« Les amoureux qui se bécotent sur les bancs publics, bancs publics, bancs publics,
En se disant des « Je t’aime » pathétiques. Ont des petites gueule bien sympathiques. »
Georges Brassens – 1954
Aujourd’hui on va parler d’Amour. Notez la majuscule, elle a son importance.
Je préfère prévenir tout de suite, si vous êtes d’un naturel un peu fleur bleue : ça serait peut-être mieux de vous abstenir de lire la suite. Je ne voudrais pas avoir de plaintes sur le dos. Non pas que j’en ai quoique que ce soit à carrer mais ça fait toujours mauvais genre pour un blog de bonne famille tel que celui-ci de se retrouver enseveli sous les tombereaux d’insultes en tout genre de personnes crédules qui seraient tombées là par hasard, aguichées qu’elles furent par un titre que je concède trompeur. Relisez bien la phrase précédente, même moi j’ai été obligé de le faire trois fois pour vérifier que c’était bien français. Enfin vous voyez le topo, l’atmosphère est belliqueuse, on risque d’avoir droit à de la violence gratuite. Du règlement de compte à l’ancienne. Il ne faut pas m’en vouloir, j’ai un mauvais fond. Je suis un connard arrogant et prétentieux. Et cynique en plus.
A partir de maintenant je considère que vous êtes prévenus. Les sommations d’usage ont été faites en bonnes et dues formes, faudra pas venir me chialer dans les rouflaquettes (que je n’ai pas).
Place à l’Amour.
Avec des cœurs autour.
Comme j’ai tendance à aimer commencer par le commencement je vais vous narrer ici la genèse de cette note sous la forme d’un dialogue dont je fus un témoin privilégié. D’autant plus privilégié que j’y ai pris part… La personne qui me donne la réplique sera interprétée par Lady Gaga afin de préserver son anonymat (les noms cités sont des pseudonymes).
Lady Gaga : Ah tiens, tu sais pas quoi ? Y’a Adolf qui est amoureux de Benita !
Moi (interloqué) : Pardon ? Qu’ouïs-je ? Mes saintes esgourdes entravent-elles bien tes dernières paroles ? Dis-donc Lady, tu ne te foutrais pas un peu de ma gueule par hasard ?
Lady Gaga : Croix de bois, croix de fer, si je mens je vais en enfer !
Moi (teigneux) : Non mais j’y crois pas trop tu vois, ces gens qui se disent amoureux ne savent pas de quoi ils parlent.
Lady Gaga : Pourrais-tu, s’il te plaît, préciser ta pensée, Ô vénérable guide céleste ?
Moi (freestyle) : Et bien tu vois ma petite Gaga, je considère que la plupart des gens sont extrêmement cons et que, de ce fait, ils sont bien incapables de mettre des mots sur les sentiments qu’ils croient éprouver.
Lady Gaga : Gaga ! Ouh la la !
Ouh la la, c’est le moins qu’on puisse dire. Gaga sait trouver les mots justes. C’est un de mes classiques : le bon vieux dérapage verbal, saupoudré d’une misanthropie de bon aloi. Mais permettez-moi de persister, voire de signer. En effet, si vous prenez le temps de regarder un peu autour de vous, vous ne manquerez pas de remarquer que l’amour est partout. Celui en minuscule. Celui qu’on nous le sert à toutes les sauces. Il se vend, il s’achète. On le galvaude, on le marchande. Il est facile. Il est dans le pré ou sur la plage. Y’a qu’à se baisser. Tout le monde en parle mais personne ne sait ce que c’est… Des fois on peut quand même se demander si les gens comprennent vraiment ce qu’ils disent ou s’ils se contentent de répéter les conneries qu’ils voient à la télévision le dimanche soir sur TF1 (cette question est purement rhétorique, ne me forcez pas à préciser bordel). J’allais les traiter de singes savants mais ça serait vraiment faire insulte aux bonobos que de les comparer à ces abrutis.
Au collège ou au lycée, tu passes ta vie à tomber amoureux. La première nana qui croise ton chemin est instantanément ajoutée à La Liste. Celle des candidates pour devenir la mère de tes enfants. Si t’ouvrais les yeux tu te rendrais peut-être compte que sa seule qualité c’est de t’avoir adressé la parole une fois, d’avoir les seins qui poussent ou d’être capable de gratter suffisamment d’argent de poche à ses parents pour s’acheter assez de fond de teint pour cacher les boutons d’acné qu’elle a sur la gueule. Un peu léger, même quand on a la dalle. Dans les cas les plus sévères ça va parfois très loin dans la jusqu’à l’écriture de poèmes ou autres merdes comme ça. Tu crois que tu éprouves des sentiments mais c’est juste le symptôme d’un sévère dérèglement hormonal.
[Notez tout de même, au passage, que je dézingue sans sourciller une précédente note sur les émois adolescents. Ce blog ne brille ni par sa cohérence ni par sa déontologie. Y’a plus de respect.]
La suite n’est pas plus reluisante. La vingtaine c’est la décennie où ta principale activité c’est de lever des poufiasses dans des boîtes de nuit sordides. Les critères de sélection sont encore plus lamentables qu’avant : tout repose sur ton taux d’alcoolémie, celui de ta cible, la quantité de cuisses et de nichons qu’elle laisse dépasser de la robe qu’elle a acheté en soldes chez H&M, l’inventivité de tes potes en termes de paris miteux et ta capacité à couvrir le vacarme pour placer ton « ouais t’es bonne jolie, j’te paye un verre ? ». J’aime autant te dire que si tu considères que tu as une chance de trouver ton âme sœur éternelle de cette façon tu mérites vraiment ce qui va t’arriver dans le prochain paragraphe.
Entre trente et cinquante ans c’est en général la période où tu t’aperçois qu’épouser la poufiasse du paragraphe précédent c’était pas forcément une bonne idée. Bon okay, vous aviez aimé les trois derniers films de Fabien Onteniente et le dernier Marc Lévy mais c’était probablement un peu léger comme base pour décider de mettre votre patrimoine génétique en commun et laisser la trace de pneu de votre existence sur le slip de la génération suivante. Si t’es balèze en auto-persuasion tu peux éventuellement réussir à te persuader que tu es heureux de faire le sacrifice de ton bonheur personnel afin d’élever dignement tes rejetons. Et si tu as beaucoup de chance ta nana est aussi conne que toi et vous avez fini par devenir potes. En théorie tu devrais rentrer dans une phase de questionnement existentiel et d’introspection mais comme tu ne sais pas ce que ça veut dire tu te contentes de demander le divorce ou de consulter la liste des meilleurs clubs échangistes de la ville.
Quand tu dépasses les soixante balais on change encore de registre. Ça devient une question de dignité. Dit comme ça, ça a l’air plus noble. Que dalle. Tu te rends compte que ça sent la fin et que tu n’as pas de plan épargne retraite digne de ce nom ou des gosses tellement mal élevés qu’ils prendront même pas la peine de payer la maison de retraite ou l’aide à domicile qui va t’aider à trouver le chemin du cimetière. Là c’est l’instinct de survie qui prend le dessus, faut être prêt à toutes les saloperies pour ne pas finir tout seul allongé sur un lit de camp, au fin fond d’un dispensaire, couvert de croûtes et d’escarres. Alors tu te la racontes en mode briscard, vieux sage du village qui cherche une compagne pour l’accompagner vers l’abysse et tout le bordel, en espérant masquer tant bien que mal que tu crèves de peur à l’idée de finir la course tout seul. Flipette va.
Et dans toute cette médiocrité quotidienne il y’a encore des gens qui osent qualifier d’amour ce qui n’est rien de plus qu’un simple réflexe pavlovien visant à répondre à la vacuité d’une vie à laquelle ils sont incapables de donner le moindre sens. Un placebo pour les mongols qui cherchent vaguement à éprouver un truc pour se persuader d’être comme tout le monde. Mais je ne peux pas leur en vouloir, ils sont vraiment comme tout le monde, beaucoup trop cons pour comprendre ce qui se passe autour d’eux, c’est dans l’ordre des choses. Quand je vois ça j’ai envie de les euthanasier à coups de claques dans la gueule pour débrancher définitivement les trois neurones qui sont en stase dans l’amas de terminaisons nerveuses qui leur sert de cerveau. Mon aversion pour la petitesse des sentiments est quasi obsessionnelle quand j’y pense, je dois être un putain d’eugéniste nazi ou un truc pas trop fréquentable dans le genre. Ça me ferait vachement flipper si j’avais un surmoi.
L’Amour ça implique tellement de complémentarité intellectuelle et physique que c’est un truc qui a quasiment aucune chance d’arriver réellement à qui que ce soit. Les statistiques des grands nombres ont cette merveilleuse faculté de nous assurer, peu ou prou, qu’il existe, quelle que part sur cette terre, au moins une personne qui nous est absolument et totalement complémentaire. Une personne faite pour nous, au sens littéral du terme. Une personne dont le parcours personnel est tel qu’elle s’est façonnée une personnalité qui est exactement le Yang de notre Yin. Seulement les mêmes impitoyables statistiques nous assurent également que nous n’avons aucune chance de rencontrer ladite personne ou que, si par un improbable hasard la rencontre avait lieu, les circonstances s’opposeraient à un quelconque rapprochement. Les circonstances c’est toujours la merde, faut pas rêver, ça se goupille bien que dans les films. Et encore, pas tous (cf. La Chute ou Irréversible). Allez expliquer ça à des connards dont la seule contribution à l’humanité a été d’inventer les mocassins parce qu’ils sont incapables de nouer leurs lacets tout seuls…
A ce stade de la lecture vous commencez probablement à vous demander ce qui vous a pris de vous lancer dans la lecture de cette abomination. Comme je ne fais pas dans le soin palliatif je vais abréger vos souffrances en vous livrant le test ultime pour savoir si vous êtes amoureux de celle ou celui que vous appelez votre moitié :
1. Vous pouvez parler pendant des heures sans jamais vous faire chier.
2. Vous pouvez rester ensemble sans rien dire du tout, vos silences sont apaisants, jamais pesants.
3. Vous vous comprenez seulement en échangeant un regard.
4. Vous baisez comme des lapins.
Si vous avez coché ces quatre propositions vous êtes un bon candidat au bonheur, gardez votre meuf ou votre mec car elle ou il vaut de l’or.
« Quand les mois auront passé
Quand seront apaisés
Leurs beaux rêves flambants
Quand leur ciel se couvrira de gros nuages lourds
Ils s’apercevront émus
Que c’est au hasard des rues
Sur un de ces fameux bancs
Qu’ils ont vécu le meilleur morceau de leur amour. »
Georges Brassens – 1954
Et pour me faire pardonner :
Oh, tu t’es fait plaqué ce week end ou quoi ???
Et tes lettres du lycée … j’peux les mettre à la poubelle alors ???
Haha même pas, je suis capable de passer en mode rageux sans la moindre raison objective… Quant aux dites lettres, j’ose espérer que tu ne les as pas conservées, ça serait vraiment trop flippant (même si ces fulgurances épistolaires prendront probablement une valeur considérable après mon premier Nobel).
Il me semble pourtant les avoir conservées, quelque part au fond d’un carton perdu parmi 500 autres cartons au fin fond du grenier chez mes parents à 500km d’ici… les retrouver se révèlerait donc une tâche pour le moins ardue…mais pas impossible !! l’assurance pour moi que tu sauras toujours te comporter en gentleman (c’est moche le chantage, hein…. mais je peux pas résister au plaisir de te faire flipper !! )
Je n’ai STRICTEMENT aucune raison de flipper. J’assume TOUT.
T’as pris la technique de remplacement d’une connaissance par une personnalité chère à Boulet et d’autres illustrateurs du net ! Gaffe aux royalties !
Sinon le problème du pamphlet anti-amour, c’est que c’est dur à faire passer sans avoir l’air légèrement frustré.
Heureusement, ta verve te sauve et c’est toujours aussi agréable à lire!
Haha, bravo les insinuations. C’est le problème de la rageosité gratuite, je le concède bien volontiers. J’essaye de noyer ça dans ma logorrhée, ça marche parfois…
« laisser la trace de pneu de votre existence sur le slip de la génération suivante »
HA HA HA HA HA
ps: à cause de tes conneries, la prochaine fois que je tombe amoureux, je vais me sentir obligé de me justifier comme un Nazi à Nuremberg.
Sinon (ouais, je mets un PS avant de continuer mon commentaire pépax) je suis plus que d’accord avec ça :
« 1. Vous pouvez parler pendant des heures sans jamais vous faire chier.
2. Vous pouvez rester ensemble sans rien dire du tout, vos silences sont apaisants, jamais pesants.
3. Vous vous comprenez seulement en échangeant un regard.
4. Vous baisez comme des lapins. »
Mais cocher les quatre ne te garantie en rien de ne pas être un con :
1. Les cons peuvent parler pendant des heures de la filmo d’Onteniente ou commenter débilement des débilités. Souviens-toi de la queue pour la soirée Label UGC
2. Comme les cons sont cons, il arrive qu’ils n’aient rien à se dire (même si dans la plupart des cas, le propre du con c’est de causer vaille que vaille, surtout quand il n’a rien à dire). Dès lors, il pensera remplir cette case alors qu’en fait, il est juste apaisé parce qu’il n’y a rien dans sa tête. Heureux les simples d’esprit disait je ne sais plus trop qui…
3. Là encore, le con peut se persuader de comprendre ce qui se passe dans la caboche stérilisée de sa moitié rien qu’en épinglant ses yeux torves aux siens. D’autant plus que sa moitié étant au moins aussi conne que lui, elle se persuadera qu’elle était justement en train de penser à ce que son mec pensait avoir deviné qu’elle pensait.
4. Jusqu’à preuve du contraire, les cons peuvent aussi baiser donc là…
Tout ça pour dire que, que ce soit devant TF1 ou ton blog, le con reste con. Et comme il ne voudra pas se l’avouer, il ne se rendra jamais compte que c’est de lui que tu parles ici. Et donc il pensera que son histoire répond à tes quatre propositions et sera quand même persuadé d’être amoureux.
Le mieux, c’est quand même qu’on laisse décider des gens intelligents non ?
Hum… Si je suis ton raisonnement, l’aboutissement logique de tout ça serait de monter une espèce de tribunal inquisitorial composé de gens intelligents afin de juger (et de condamner) les cons qui se croient amoureux. Ça me paraît sympa comme idée. Par contre y’en a d’autres qui ont essayé d’appliquer cette technique (sur d’autres tranches de la population) et qui ont eu des problèmes à la fin. Il faudra donc agir avec discernement.
Et pour ce qui est de se justifier comme un Nazi à Nuremberg, quand on voit l’attitude de Göring, je ne pense pas que ça soit la meilleure façon Hahaha
J’ai lu mon commentaire 50 fois pour vérifier que ça voulait dire quelque chose et même comme ça, j’en suis pas sûr. Mais bon, tant pis hein.
Mais tu serais pas un grand sentimental qui idéalise l’Amour, des fois ? Tss, tss…
Tu réalises quand même qu’à aucun moment l’intelligence des personnes concernées n’entre en ligne de compte dans le sentiment amoureux ? Comme l’a démontré Mogadishow, l’Amour c’est aussi pour les cons. Je pense même qu’il faut mettre un peu entre parenthèse son intelligence pour aimer.